Posté le : 23/04/2022 23H32
La visite des forgerons de Naborum.
À Naborum, les tranchées avancent vite. Grâce aux premières pierres de Tenquin, les fondations sont posées. Les frères d’Ortega retournent à Durandalem avec les deux grands chariots vides.
Les forgerons de Naborum - Jean Schuss, ses deux fils et les deux apprentis - profitent des chariots pour faire le voyage. Ils emmènent avec eux les forgerons retraités, Nicolas Lemas, 73 ans, et Georges Clounet, 71 ans, qui eux aussi sont curieux de découvrir cette technologie.
« Et on va rencontrer ce bon vieux Robert Schmit, dit Nicolas Lemas, ça fait une sacrée belle lurette qu’on ne s’est pas revus ! »
Les chariots arrivent au portail est.
Benoît Spohr, par la fenêtre de la salle de garde, interpelle les arrivants.
« Qui va là ?
- Les frères d’Ortega... et des forgerons pour Jérémoy Mayer, et des vétérans pour Robert Schmit !
Alors Benoît nous appelle mentalement, Jérémoy et moi.
« Nous sommes à l’auberge, répondons-nous. Dis-leur qu’on se retrouve là-bas ! »
Et Benoît manœuvre l’ouverture du portail sous les yeux ébahis des forgerons.
Les chariots sont déposés chez Émile. Nestor Pferd les tiendra prêts pour demain matin.
« Si on passait d'abord prendre prendre une douche chez Joel ? suggère Jean Schuss.
- Volontiers, approuvent les frères d’Ortega, on sera mieux nus ! »
Ils n’ont plus l’habitude de vivre avec des vêtements sur eux...
Les jeunes, eux, ne sont pas très enthousiastes au départ, mais finissent par faire comme les aînés. Et c'est ainsi qu'un peu plus tard toute la troupe se retrouve nue et chemine à pied jusqu'à l’auberge.
Ce sont des grandes retrouvailles... Il y a plus de trente ans, c'est moi qui avais formé les forgerons de Naborum aux techniques des douches. Jean Schuss n’était qu’un jeune apprenti, à l’époque.
« Oh, mais c'est Alison ! s'exclame soudain Jean. Tu vois, je me souviens encore de toi... Toujours aussi belle ! Tu m’avais invité pour ton anniversaire, pour tes quinze ans ! Quelle grande fête ça avait été !
- Oui-da ! acquiesce Alison. Pour une belle fête, c’était une belle fête ! Et c'est nous qui avions étrenné les Thermes ... Quel chantier on avait mis ! »
Et les voilà tous deux partis à se raconter leurs vies, ce que sont devenus les autres, et tout ça...Jean lui suggère d'aller tous deux passer un bon moment aux Thermes, tout comme au bon vieux temps. Nostalgie, quand tu nous tiens !
« On va d’abord faire une visite guidée, intervient Jérémoy. Rendons-nous à la porte ouest, vous verrez comment fonctionne le système !
- Bien volontiers, nous te suivons... Alison, un de ces jours, on se refera une petite fête, hein ?
- Mais avec plaisir, Jean. On se recontacte, promis !
- Je reviendrai souvent ! »
Et les forgerons de Naborum et ceux de Durandalem, et mes petits-fils Nathan et Léo, et nous les vieux forgerons retraités, nous voilà tous dans la salle de garde ouest. Les gardes de faction, Jacques Martin et Georgette Fart, se demandent bien ce qui leur vaut cette affluence !
J’explique la technique des générateurs de vapeur, puis Jérémoy explique celle des pistons, et du renversement de la vapeur.
La manœuvre d’ouverture et de fermeture des portails est testée, plusieurs fois. Je me demande alors, avec un peu d'inquiétude, si le système ne va pas trop chauffer, vu qu’il n’a pas le temps de refroidir. Mais non, ouf... Les pistons ont tenu bon, et le portail a manœuvré dix fois de suite sans faiblir !
« Maintenant, dis-je, allons dans l’atelier contigu à la grande forge.
- Ah oui, se souvient Jean. Là où tu coulais l’or !.
- Oui, au début, mais tu sais que Gabrielle… tu te souviens de Gabrielle ?
- Oui, elle était apprentie avec moi chez Nicolas. Et puis elle est tombée amoureuse d’un gars d’ici... Un mineur, je crois. Et elle est restée à Durandalem.
- Oui, je l’avais affranchie. Elle voulait monter une fonderie dans la colline. Ce qu'elle a fait.
- Oui da ! Et sa fonderie, depuis tout ce temps, a transformé en or des quantités énormes de minerai ! Nous irons la visiter, mais pour l’heure, suivez-moi à la grande forge...»
Arrivé à la grande forge, je dis :
« - Voyez ce que j'ai réussi à construire, avec des pistons et avec l’aide de mon gendre et de mes petits-fils : une chariote autonome à vapeur, qui peut transporter quinze personnes sur plusieurs lieues ! Profitez de l'occasion... Comme vous êtes à pied, je vous ramène en chariote à Naborum !
- Et…Euh...C’est fiable ? s’inquiète Jean-Paul.
- Figure-toi, mon garçon, que cet hiver, alors qu’il gelait à pierre fendre, j’ai conduit l’Empereur Charlemagne lui-même jusqu'à l’Abbaye des Glandières, et je l’ai ramené à Durandalem, tout nu mais bien au chaud, grâce aux générateurs de vapeur de la chariote !
- Robert a fait encore mieux ! En février, Il a emmené d'un coup vingt-sept personnes, toutes nues, dont vingt-deux filles, jusqu'à Falkenberg. Tout ça en déblayant la neige au passage, avec cette chariote et une remorque !
- Oui oui ! Tu vois que c’est fiable, Jean-Paul ! Mais si tu crains, tu peux toujours rentrer à pied ! »
Tout le monde éclate de rire.
Pendant que Nathan et Léo vont préparer leur véhicule, je vais montrer aux visiteurs le modèle "chariote des champs" qui tourne en ce moment derrière la ferme. Nous arrivons au champ que le Borgne avait labouré. Là, il est en train de ratisser pour semer, toujours couché à plat ventre dans sa machine. Il s’arrête à notre hauteur, et explique :
« Regardez un peu ce que Nathan et Léo ont réussi à me fabriquer : un système qui plante automatiquement les graines dans la terre, au fur et à mesure... Le fermier de demain, s'esclaffe-t-il, ça sera un sacré fainéant ! »
Et tout le monde applaudit en rigolant.
« Mais pourquoi diable est-il couché ?
- Le Borgne est l'un des héroïques soldats qui ont décimé Khan et ses pillards. Pendant le combat, le pauvre, il a reçu une flèche dans la fesse. Mais ça ne l’empêche nullement de travailler. Juste de s’asseoir ! »
Et les forgerons rigolent de plus belle... La fesse du Borgne, ça fait rire à tous les coups !