Posté le : 29/09/2022 21H41
15 eme legislature question 20356 de Mr ugo Bernalicis au ministere de la justice reponse du ministere
la on voit bien toute la liberté laissée au juge pour reprimer ou pas
L'article 222-32 du code pénal réprime d'une peine d'un an d'emprisonnement et de 15.000€ d'amende « l'exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public ». La caractérisation de ce délit nécessite la réunion de trois éléments constitutifs : une exhibition sexuelle, le caractère public de l'acte et un élément moral, c'est-à-dire l'intention de commettre l'infraction, qui se distingue du mobile, ce dernier étant indifférent. Ce texte ne définit pas davantage l'élément matériel de ce délit, les actes permettant de constituer l'exhibition sexuelle étant susceptibles d'évoluer au gré des mœurs, imposant par conséquent une appréciation des éléments propres à chaque espèce. De manière classique, constituent l'élément matériel du délit d'exhibition, les actes de nature sexuelle commis en public, les gestes et attitudes obscènes, et les gestes ou attitudes manifestement impudiques. S'il a été jugé que la seule exhibition de la nudité ne constituait pas en tant que telle l'infraction, si elle n'était accompagnée d'aucun geste ou attitude déplacés (CA Douai, 28 sept. 1989), la question du nu, sans attitude obscène, fait l'objet d'une jurisprudence évolutive. La caractérisation du délit, en ce domaine, suit l'évolution des mœurs et de la notion de pudeur. Les décisions les plus récentes s'orientent ainsi vers une condamnation plus systématique de la nudité imposée à autrui. Ainsi, le fait de se promener nu, y compris à proximité d'une plage ou bien de s'exhiber nu à la fenêtre de son domicile en attirant l'attention des passants caractérise l'infraction d'exhibition sexuelle. S'agissant plus spécifiquement de la nudité de la poitrine des femmes, il convient de rappeler que la poitrine féminine est considérée comme une partie intime du corps, relevant des organes sexuels, tant dans la jurisprudence traditionnelle relative à l'exhibition sexuelle, que dans celle relative à l'agression sexuelle, qui réprime l'attouchement non consenti de la poitrine d'une femme. Concernant le contexte de l'exhibition et plus précisément le cas de militantes FEMEN poursuivies pour exhibition sexuelle dans le cadre d'un acte revendiqué comme politique et non connoté sexuellement, la Cour de cassation, dans deux arrêts récents de la chambre criminelle du 10 janvier 2018 et du 9 janvier 2019, a écarté le mobile comme étant indifférent à la caractérisation de l'infraction. Elle a ainsi considéré, dans sa première décision, qu'en relaxant faute d'élément intentionnel de nature sexuelle, « alors qu'elle relevait, indépendamment des motifs invoqués par la prévenue, sans effet sur les éléments constitutifs de l'infraction, que celle-ci avait exhibé volontairement sa poitrine dans un musée, lieu ouvert au public, la cour d'appel (avait) méconnu le sens et la portée du texte susvisé ». Dans sa seconde décision, la cour a jugé que la décision de condamnation de la militante poursuivie pour avoir exhibé sa poitrine dénudée dans un lieu de culte « n' (avait) pas apporté une atteinte excessive à la liberté d'expression de l'intéressée, laquelle doit se concilier avec le droit pour autrui, reconnu par l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme, de ne pas être troublé dans la pratique de sa religion ». Il apparaît que l'incrimination actuelle est suffisamment souple pour permettre aux juridictions d'apprécier, en fonction des circonstances de l'espèce et du contexte entourant la nudité, si l'infraction est caractérisée ou non, sans que des instructions de politique pénale n'apparaissent nécessaires.
Message edité le 29/09/2022 21H51