Posté le : 26/11/2021 14H24
Petit rappel historique ; la premiere publication sur un forum naturiste par peter concernant son "" affaire "
Je vous préviens, c'est tout une histoire, donc un peu longue
Le ton donné pendant cette "audition libre" à la gendarmerie de Lamastre (Ardèche) est rude, je n'ai pas eu l'impression que le gendarme ait vraiment intégré la notion de présomption d'innocence. A mes demandes de s'en tenir dans ses écrits aux faits et formulations que je lui ai donné, il hausse le ton et dit que c'est lui qui gère l'audition, me fixant pendant des minutes avec un regard figé, sans rien dire. Il me demande aussi les noms de personnes en rien impliquées dans cette affaire, ce que je refuse catégoriquement. De plus il fait suivre la prise des photos, des empreintes digitales et du prélèvement d'ADN de la menace de poursuite pénale en cas d'un refus.
Que m'arrive t-il donc pour avoir droit à un tel traitement ? Voici une histoire qui débute un très beau jour de vacances, fin août dernier, et qui en arrive maintenant au tribunal correctionnel de Nîmes.
Nous étions "en famille", c'est-à-dire ma compagne, ses deux enfants âgés de 8 et 15 ans et moi, pour une semaine de vacances dans le Gard, chez des amis de longue date. Je connais la région depuis au moins 30 ans, ses magnifiques coins au bord du Gardon, loin du tourisme de masse, où l'on peut se baigner en toute tranquillité et, si on veut, sans maillot pour profiter entièrement du soleil et de cette liberté. Nous voilà par des chemins de terre après une marche à pied pour accéder à notre petit coin de paradis, pique-niquer et passer ensuite l'après-midi comme des lézards au soleil et comme des poissons dans l'eau. Nous étions seuls, personne en vue, ni à gauche, ni à droite, ni en face. Après le pique-nique une petite sieste au soleil sans maillot, comme je l'ai toujours pratiquée si les circonstances le permettent, c'est-à-dire sans provoquer personne, rien de plus naturel.
Quand ma compagne et moi nous sommes mis à l'eau puis nageant et s'approchant de l'autre bord de la rivière, nous furent apostrophés par une femme qui s'était installée entretemps avec un homme sur la rive en face. Nous nous sommes arrêtés pour mieux entendre ses vociférations, toujours immergés jusqu'au ventre. C'était proféré d'une manière très agressive contre le fait que nous n'étions pas habillés selon leur convenance. Nous avons répondu qu'ils n'étaient pas obligés de nous regarder et qu'il suffisait de regarder ailleurs, puis, nous nous sommes retirés vers notre rive pour arrêter cette altercation avant qu'elle ne dégénère. Il faut dire que le Gardon est large de plus de 50 m à cette endroit et il faut forcer le regard pour voir le sujet qui incarne pour certains une zone corporelle tabouisée.
Néanmoins, la femme a continué à nous crier après et au bout d'un moment elle est partie pour revenir avec deux hommes, s'est entretenus avec eux, nous montrant du doigt. Entre-temps je me suis remis à l'horizontale pour bouquiner, jusqu'à ce moment où ma compagne m'a indiqué qu'il y avait des gendarmes de l'autre coté s'adressant à nous.
Alors là, j'ai été très surpris sur le fait qu'un simple bain sans maillot dans un endroit tranquille et isolé puisse mobiliser les forces de l'ordre à la demande d'une personne dérangée par un corps nu au soleil, éloigné d'au moins de 50 m par une rivière. Les deux gendarmes m'ont demandé de venir, mais ils n'ont pas voulu m'en donner la raison. J'ai donc répondu que je ne viendrais pas s'ils ne me la donnaient pas. J'ai entre temps remis mon maillot de bain. Peu après, équipés d'un canoë, ils ont débarqués de notre côté et m'ont demandé de les accompagner pour un procès verbal. Je l'ai refusé et j'ai avancé que la nudité seule n'est pas un délit répréhensible, il n'y avait aucun geste provocateur ou sexuel dans notre comportement.
Je le savais, car là où j'habite, une mairie avait voulu interdire par arrêté municipal aux femmes de se baigner torse nu. A l'époque il y avait eu une mini-manifestation "rendez-vous torse nu" au plan d'eau municipal et les gendarmes, envoyés par le maire avaient constaté, conformément avec la loi, que cela ne constituait pas un délit et ce malgré l'arrêté municipal. J'ai participé à ce "rendez-vous torse nu" et à cette occasion on s'est informé un peu plus sur l'encadrement de la nudité par la loi. J'ai appris que pour qu'il y ait exhibition, il faut qu'il y ait "acte sexuel normal ou anormal commis sur soi-même ou sur autrui, gestes ou attitudes lascifs ou provocants".
Bref, après discussion et après avoir montré la légitimité de mon existence (les papiers) les gendarmes n'ont plus insisté pour que je les accompagne au poste. Avant de partir le "chef" a constaté que j'étais maintenant en maillot et que pour lui l'affaire était réglée. L'autre gendarme a remarqué que je pouvais me retirer encore un peu plus de la rive si je voulais continuer à me mettre et éviter des désagréments avec les personnes en face.
Malgré le fait que j'ai gardé après cette visite mon maillot, la femme en face ainsi que son compagnon ont continué de vociférer contre nous et de nous provoquer. On a réussi à n'y faire d'attention pour ne pas gâcher encore plus un après-midi de nos vacances. Le soir de retour chez nos copains, leur réaction a été d'être à moitié choqué et moitié amusé par cette manifestation de pudibonderie extrême.
Apparemment, la dame en face n'a pas été capable de surmonter une certaine rancune, car elle a porté plainte pour "exhibition sexuelle" et le substitut du procureur du parquet du tribunal de grande instance m'a convoqué, déjà au lendemain de l'audition à la gendarmerie, pour comparaître devant le tribunal correctionnel à Nîmes le 27 mai à 14h.
J'ai bien accepté le fait que je sois auditionné par la gendarmerie (malgré la manière avec laquelle cette audition a été faite), c'est leur travail si une plainte a été déposée. A la limite, je peux aussi accepter la prise de mes empreintes et de l'ADN pour rechercher d'éventuels antécédents dans le domaine des délits sexuels. Mais je ne peux pas nier ma stupéfaction sur la machinerie qui s'est mise en marche pour cette histoire. J'avais pensé que le procureur allait classer l'affaire sans suite, car pour moi ce n'était pas imaginable dans ce 21ieme siècle, en Europe occidental et de plus en France (le pays de la liberté déclarée et constitutionnelle), que ce fait divers puisse finir devant le tribunal. Mais non - c'est possible et il faut maintenant que cela serve pour parer à une régression vers un obscurantisme puritain.
Personnellement je ne me suis jamais privé de me baigner sans maillot si les circonstances étaient favorables, c'est-à-dire être éloigné convenablement des regards. Cela n'a jamais été une question de militantisme nudiste, tout simplement un comportement naturel et sans arrière pensée. J'ai essayé de l'expliquer au gendarme lors de l'audition, mais pour lui ce n'était que l'occasion de supposer qu'il était pour moi normal de me balader nu en ville.
Jamais jusqu'à maintenant j'ai eu le moindre problème avec mes "bains nu" et je pense encore aujourd'hui que c'est une simple question de bon sens et de tolérance. Mon beau-fils de 8 ans m'a dit, quand je l'ai informé de cette plainte, que la police va avoir beaucoup de travail s'il faut s'occuper de tous ceux qui se baignent nus sur la plage des Stes Marie de la mer où l'on a passé plusieurs fois nos vacances.
Il m'a fallu encaisser cette avanie. Dans un premier temps, je me suis senti attaqué en tant qu'individu, puis m'a été donné le bon tuyau de m'adresser à l'association APNEL (adhéré depuis!). J'ai alors compris qu'il faut se battre pour que les acquis concernant la liberté, aussi à titre individuel, ne reculent pas. Je sais qu'il n'y a jamais d'acquis définitifs, il faut les défendre à titre individuel comme collectivement. Et de cela je suis déterminé et en train de le faire.