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L'article
Seine-et-Marne : un projet de centre naturiste géant dans... un hameau
Boulodrome, piscine, spa, magasins… La dynamiterie de La Genevraye, abandonnée depuis près de trente-cinq ans, pourrait accueillir jusqu’à 1300 naturistes d’ici trois ans. Les riverains craignent que cette installation perturbe la tranquillité de leur village.
Cugny, février 2021. Fermée en 1987, après 100 ans d'existence, la dynamiterie de la Genevraye est désormais une friche industrielle de 17 hectares. DR
Par Faustine Léo
Y aura-t-il un centre de vacances naturiste pour des centaines de touristes à Cugny (Seine-et-Marne), dans le hameau reculé de La Genevraye ? L'accueil de ce nouveau public dans l'ancienne dynamiterie peut prêter à sourire. Demeure la question du devenir de ce domaine de 17 hectares, à l'abandon depuis près de trente-cinq ans.
Désormais domaine de jeux des sangliers et refuge des chauves-souris, ce terrain rappelle, par les nombreux bâtiments encore debout, le siècle de présence de la Société française des explosifs, où l'on fabriquait de la nitroglycérine. Dans la zone boisée, une trentaine de casemates en béton, prises entre les lianes et recouvertes d'arbres, sont les témoins de cette époque révolue.
Olivier Reynaud souhaite donner une vocation touristique à cet endroit. Il a racheté il y a dix ans une partie du hameau, dont la dynamiterie, soit une centaine d'hectares. Avec Luis Do Souto, le président de Nature et Résidence, il imagine implanter 280 maisonnettes en bois, en accession à la propriété entre 120 000 et 200 000 euros. Et des équipements collectifs : boulodrome, piscine, spa, sauna et salle de réunion.
«Il y a une demande de renouer avec les choses simples»
Dans les bâtiments de l'entrée sont prévus des commerces. Un investissement entre 10 et 15 millions d'euros. Mais la municipalité doit d'abord modifier le plan local d'urbanisme pour que la zone industrielle soit classée en zone touristique.
Le comité régional de naturisme plaide pour que ce lieu de résidence soit dédié à ses pratiquants. « Il y a 500 000 adeptes en Ile-de-France, assure Julien Claudé-Pénégry, son président, impliqué dans le projet depuis deux ans. Le naturisme, ce n'est pas que sur une plage, au soleil. C'est une philosophie de vie qui prend son envol chez les urbains. Il y a une demande de renouer avec les choses simples. »
Le président du conseil départemental y est favorable
Dans la région, les naturistes disposent de trois lieux qui leur sont réservés, dont le plus récent, Héliomonde, se déploie sur 47 hectares à Saint-Chéron (Essonne), depuis les années 1960. « Il n'y a rien en Seine-et-Marne. C'est bien qu'il y ait des municipalités qui osent. Le site a un potentiel », assure Julien Claudé-Pénégry.
Même le président du conseil départemental y est favorable. « C'est un bon projet qui fera découvrir notre département », estime Patrick Septiers (UDI). Il préside aussi la communauté de communes Moret-Seine-et-Loing, qui est maître d'ouvrage dans ce projet, puisque la commune n'a pas les moyens techniques de mener les études nécessaires.
Ce parc de résidence qui pourra héberger jusqu'à 1300 personnes, pourrait doubler le budget de la commune en termes de retombées fiscales. Mais des habitants ont des craintes. « L'ampleur du projet me dérange, estime Louise, 35 ans. Je suis venue ici pour être tranquille, pas pour être à côté du Club Med. »
«Pas de soirée mousse ni d'élection de Miss Camping»
« Il n'y aura pas de soirée mousse ni d'élection de Miss Camping, assure Luis Do Souto. Ce sera occupé toute l'année, il n'y aura donc pas 200 voitures à 9 heures le samedi matin. » La création d'un accès par la départementale et non par le hameau constituerait une voix de concorde.
La zone commerciale du village naturiste, ouverte aux « textiles », pourrait également séduire les habitants du hameau, loin de tout magasin. Les naturistes y seraient vêtus. En revanche, ils veulent conserver un accès nu à la piscine. « On pourra accorder des créneaux pour les textiles », concède Julien Claudé-Pénégry.
Reste l'éventuelle pollution du site, pointée par des opposants au projet. Les toits des abris des casemates sont en amiante, du plomb s'effrite autour d'un four, la mare à acides est toujours là. « J'ai acheté un terrain dépollué en 1987 », avance Olivier Reynaud.
L'Etat, conscient « d'une pollution possible des sols issue du passé du site » estime qu'il faut « mener d'autres études environnementales pour statuer sur la faisabilité du projet ». « Les naturistes sont attachés à l'environnement. Ils ne viendront pas si tout n'est pas nickel », prévient Julien Claudé-Pénégry.